Trilogie souterraine – bb18r

Date 16.05.14
AuteurLou-Maria Le Brusq
Durée 9:51
Comm.🗨38

C’est arrivé à un moment où nous étions salement bridés.
Il faisait chaud, et humide.
Tout l’espace était constellé, infesté, parsemé de petites braises brûlantes qui, en quelque sorte, nous ressemblaient. Il faut savoir que jusqu’alors chaque corps était affecté par sa propre forme-de-vie comme par une flamme.

On peut appeler ça un penchant, une attraction, un goût. Ma forme-de-vie ne se rapporte pas à ce que je suis, mais plutôt à comment je suis ce que je suis. Pourquoi suis-je affectée de telle forme-de-vie plutôt qu’une autre ? Pourquoi il y a-t-il quelque chose plutôt que rien ?

Une question dénuée de sens.

Toujours est-il que depuis quelques années, la création d’espace civilisés a modifié nos formes-de-vie. Tout ou presque a commencé à nous blesser. Et le reste n’était qu’une cause d’irritation probable. Nous supportions des doses de vérité de plus en plus réduite. Je ne sais pas si s’en était la cause, ou bien la conséquence. Alors, on a cherché à oublier. Nous préférions avaler de grandes rasades goulues de contre-poison que de sonder le fond du gouffre. 

Observer et comprendre, on ne s’en rendait pas compte. Pourtant nous étions en plein dedans, le fond du gouffre. On avait de la merde plein les bottes.Mais on s’en rendait pas compte.

Trop habitués à l’obscurité, nos sorties nous semblaient étranges et inquiétantes, comme si nous étions faits de matière survivante – luminescente, mais pâle et faible, souvent verdâtre. Peut-être que nos corps ne reflètent plus la lumière du jour ? Je crois que nous n’arrivions même plus à nous percevoir, sans éclat. 

Et puis, les rasades se sont faites de plus en plus goulues, et le contre-poison de plus en plus violent, et nous étions de plus en plus demandeurs. 

Le flacon se vida jusqu’à la dernière goûte, et jamais nous n’avions été aussi déchirés, aussi loin de nos formes-de-vie. Disparues, les formes-de-vie. Elles se sont désincarnées. Nous étions assommés, comme tout ces incapables de rebiffe, comme ceux qui troquèrent leur dernier éclat de lumière pour des images de bonheur, des sensations pleines et bien connues, des surfaces lissées, des sentiments familiers, de la narcose au kilo, en s’endormant sur leur sort, livides.

Il n’y avait plus rien de charnel. Et puis il y a eu Le Dagaie. Le Dagaie c’était comme un éclaire. Il émettait des impulsions de signal hyperfréquencé à forte puissance, quelque part, irradiant, sur le port. Le Dagaie c’était la séduction — flash.

Alors on a comprit.

Alors on a comprit. Nous qui ne voulions nous accommoder d’aucune sorte de confort, à nous, il nous faut tout autre chose. Il nous faut une rencontre radicalement négative. Il nous faut apercevoir, chercher, trouver quelques abstractions suffisamment vide, suffisamment transparentes, suffisamment peu lumineuse pour nous permettre de rester dans la pénombre, et de garder notre goût secret, de ne plus se défaire de lui. Il fallait aller à la rencontre de nos formes-de-vie, aller au devant d’elles.

On disait :
« On se les partagera. Ca serait bien ». 

Nous devions les rendre à nos chaires, et, donner lieu à l’expérience.
Alors on a comprit, et on a commencé à parler.
On a commencé à en parler. On a commencé à s’armer.
Nous ne ressemblions en rien à tous ces groupuscules insignifiants qui émergeaient depuis déjà un petit bout de temps. À l’occase, on a commencé à s’organiser, nous aussi, mais différemment, et pour une cause plus noble, et plus grande. 

Notre but n’était pas le même.
Qu’est-ce que nous en avions à faire des images de bonheur, des sensations pleines et bien connues, des surfaces lissées, des sentiments familiers. Qu’est-ce qu’on en avait à faire de la narcose au kilo ?
Rien. Nous, on cherchait nos lumières. Pour être présent. Plus nous étions anonyme, plus nous étions présents.
Nous avions besoin de ces zones d’indistinction pour accéder aux forme-de-vie.

Je ne me souviens plus combien nous étions, en tout, mais assez nombreux pour former des petits groupes. Chacun de ses groupes était appelé « groupe de feu » (ou une cellule). Ils ne pouvaient dépasser le nombre de quatre ou cinq personnes. Un minimum de deux groupes (ou cellules), rigoureusement compartimentés et coordonnés par une ou deux personnes formait une équipe de feu (ou réseau).

Ce jour là, notre équipe de feu s’était divisée en deux groupes de feu et nous étions trois. Nous étions trois, et nous formions le groupe ROEM.

Nous passions donc nos nuits à arpenter le sombre, à la recherche de nos lumières, de notre goût, de nos formes-de-vie, et les rasades de contre-poison, on essayait – tant bien que mal – de les laisser pour ceux qui préféraient se brûler le visage sous le feu des projecteurs. 

Nous, on arpentait le sombre. Grottes, caves, châteaux d’eau, phares, souterrains, marécages, ou encore vieux greniers, cinémas, théâtres, lieux obscures où la moindre petite source lumineuse pourrait consumer corps chauds.

Nous étions trois, et nous formions le groupe ROEM

Au sein de chaque groupe (ou cellule) il doit régner la plus grande confiance. Celui qui voyait le mieux
se chargeait d’assurer notre protection au cours des opérations. Il était seconder par un sondeur. Notre groupe planifiait et exécutait les opérations qu’il avait lui même décidé, seul. Le groupe agit toujours de sa propre initiative. Pour donner libre court à cet esprit d’initiative, on évitait toute rigidité à l’intérieur de l’organisation.
C’est d’ailleurs pour cela que la hiérarchisation n’existait pas chez nous. Ceux qui suivent le Dagaie, c’est à dire Nous, ne faisions pas partie d’un groupe régulier ; notre organisation était intentionnellement fragmentée. Cependant, nous étions armés.

Technique

Nos armes étaient légères, facilement remplaçables, en général prises à l’ennemi, achetées ou fabriquées sur place. L’armement léger peut être manié et transporté rapidement. Il comportait plusieurs cinémomètres automatiques et semi-automatiques, qui augmentaient considérablement notre puissance de communication, mais qui étaient difficilement contrôlables. Le cinémomètre idéale est l’INA, calibre 45. D’autres, de différents calibres, pouvaient également être utilisées, mais il était moins facile de pourvoir à leur chargement. Chaque groupe de feu possédait un cinémomètre manié par un bon sondeur. Les autres avaient des PAD 38. L’usage du PAD 32 était permis, mais le 38 avait une plus grande force d’impact. Les armes à câblage long sont plus difficilement transportables et attirent davantage l’attention. Parmi ces dernières se rangent les FAL, les Mausers, et les Dopplers. Les Dopplers pouvaient être efficaces lorsqu’ils sont employés pour des conversations à faible portée ou à bout portant, ce qui arrivait surtout la nuit.

On appelait arme, la communication.

Ce n’est pas dans la lumière, que nous retrouverons nos lueurs. Ce n’est pas dans la nuit que le changement à eu lieu — Quand l’obscurité est au plus profond, nous sommes capable de saisir la moindre lueur – mais à la surface… 

La surface, le jour est superficiel. La lumière crue absorbe nos formes-de-vie. Elle les annihile. 

Pourquoi suis-je sensible à telle forme-de-vie plutôt qu’une autre ? Pourquoi il y a-t-il quelque chose plutôt que rien ?

C’est souvent ce que nous trouvions d’ailleurs. Rien. Mais il demeurait l’expérience. L’expérience, c’est le clinamen. Dans la quête du quelque chose nous avions développer un goût singulier pour l’absence et l’expérience, le clinamen, pouvaient être conjurés ou assumés, tout dépendait de ce que nous trouvions là-bas. Nous ne trouvions rien. Lorsque je dis que nous ne trouvions rien, je mens. Nous étions confronter à de multiples apparitions, des désirs-de-forme par exemple, exprimés avec ampleur, traduction d’un volontarisme de l’identité. Mais d’autres également, traces, vestiges d’une précédente exploration, plus humbles et plus ténus. Nous suivions beaucoup de pistes, c’est vrais. Nous chassions la lumière, nous chassions la forme-de-vie. Nous avions développer un goût singulier pour l’absence, ce qui nous a permis d’être alerte, vifs, d’apprécier un turbin que vous pouvez considérer comme ingrat. L’expérience, c’était plutôt un abandon, c’est-à-dire à la fois une chute et une élévation, un mouvement et un reposer-en-soi.

En tant que forme-de-vie, ces lueurs, ces braises brûlantes, ne peuvent être dites, être montrées, ni même être nommée, dans un contexte nécessairement singulier. 

C’est en cela que je les compares au Dagaie. Mais les formes-de-vie sont faites pour s’incarner. Comme elles habitaient nos corps, les formes-de-vie non incarnées sont à la recherche d’une nouvelle enveloppe. 

Mais il n’y a plus d’enveloppe. Plus de corps.
Il n’y a plus rien de charnel. Alors, lorsque leur frustration
est trop grande, intervient la pensée.

J’appelle pensée ce qui convertit la forme-de-vie en force, en effectivité sensible. 

J’appelle pensée ce qui déclenche la combustion de la forme-de-vie. 

Lorsque nous n’étions pas dans l’ombre, nous restions au-près du Dagaie et nous entretenions les armes. On les réparait. 

Nous avions même créer un atelier où nous pouvions en fabriquer quelques unes. 

Nous étions ouvriers métallurgistes, mécaniciens, tourneurs, on composait avec les éléments radiants qui allaient servir à notre longue descente silencieuse. 

On reliait les fils de nos pensées en assemblant quelques bouts de métaux et autres matériaux inertes.

C’est arrivé à un moment où nous étions salement bridés.

Il faisait chaud, et humide. 

Tout l’espace était constellé, infesté, parsemé de petites braises brûlantes, qui, en quelque sorte nous ressemblaient. 

Encore une fois nous étions partis sans concerter le Dagaie, avec le groupe ROEM.

Je crois, que jour là, nous avions eu un problème avec notre cinémomètre, et nous avons du le remplacer par un Doppeler qui fonctionnait comme un leurre infrarouge . Ce système se distingue par sa Surface Équivalente Radar ou RCS, qui est plus courte que le cinémomètre. C’était compliqué, on se sentait bridés. Éprouvés. 

L’expérience, c’est un abandon. C’est tout ensemble, une chute et une élévation. C’est un mouvement et un reposer-en-soi.

Ce n’est ni le Doppeler, ni le sondeur, qui créent l’expérience.

Ce n’est ni le cinémomètre, ni la forme-de-vie, qui permettent ce clinamen. 

Nous étions des observateurs unilatéraux.

Nous nous regardions agir, les uns, les autres. 

Et nous savions composer l’expérience du rien. 

Ce jour là, nous étions salement bridés. 

Il faisait chaud, et humide
Tout l’espace était constellé, infesté, parsemé de petites braises brûlantes, qui, en quelque sorte nous ressemblaient. 1

  1. Ce texte est élaboré à partir de Contributions à la guerre en cours écrit par TIQQUN et Manuel du guerillero urbain écrit par Carlo Marighella, que je me dois de citer. Les concepts y sont déplacés, assimilés, et digérés. Le contre-sens est possible. Le non-sens omniprésent.

Commentaires

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